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Pourquoi je ne vendrais pas de masques barrières en tissu lavables : le parcours du combattant [EDIT 04/05/2020]

Dès le début de la crise sanitaire, et la publication du patron du CHU de Grenoble, des couturières ont pris le parti de confectionner des masques en tissu bénévolement. A ce moment-là, le port du masque en tissu était très controversé, certains disaient qu’ils ne servaient à rien, d’autres que c’était mieux que rien. Dans ma tête, depuis le début ce sont les montagnes russes, un jour, je me dis que je vais en coudre, le lendemain je change d’avis en me disant que je ne veux pas donner aux gens la sensation qu’ils sont protégés alors qu’ils ne le sont certainement pas. Je passe d’une émotion à une autre, les émotions s’enchainent, l’excitation, puis l’incertitude, le déni, la colère, etc. Finalement, fin mars, l’AFNOR a publié des spécifications pour la conception des masques en tissu. J’avais au fond de moi envie, besoin, de participer à cet élan de solidarité collective. Étant en télétravail à 100% dans mon emploi principal, mes enfants à m’occuper et ma micro entreprise, et donc peu de temps libre, j’ai profité de ma semaine de congé début avril pour confectionner des masques barrières répondants aux spécifications de l’AFNOR sur mon temps libre.

Face à l’urgence sanitaire : le recours au bénévolat

Je me suis donc inscrite sur la plateforme solidaire de l’AFNOR pour confectionner et distribuer des masques en tissu bénévolement aux demandeurs. Les profils « confectionneurs » ont été mis en ligne en fin de journée  le 10 avril. En moins de 24h j’ai reçu des demandes de particuliers pour une soixantaine de masques … Au fil des jours, répondre à toutes ces demandes de masques, toutes justifiées, était très anxiogène, dès que mon téléphone indiquait l’arrivée d’un nouveau mail dont l’expéditeur était « AFNOR », mon corps se crispait. J’ai demandé à la plateforme de supprimer mon profil confectionneur au bout de 5 jours de mise en ligne. Sur ces 5 jours, j’ai reçu des sollicitations pour près de 5300 masques… Parce que dans toutes ces demandes, je n’ai pas reçu que des demandes de particuliers, mais aussi des demandes de petites entreprises ou même de Mairies pour leur fournir entre 150 et 5000 masques. Demandes que j’ai déclinées, n’ayant pas la force de production des industriels avec ma machine à coudre, ma surjeteuse et mes deux petites mains !

J’ai rencontré de nombreuses personnes lors de la remise des masques, toujours en respectant les gestes barrières, certaines m’ont donné du tissu ou des élastiques en échange, d’autres m’ont offert des fleurs, de l’huile d’olive de Sicile ou quelques pièces, parce que la solidarité fait chaud au cœur !

Sur cette semaine, j’ai ainsi confectionné et distribué plus de 130 masques bénévolement.

Avec le recul, les couturières revendiquent le droit de vendre leurs masques

Le bénévolat, c’est bien, mais ce n’est pas toujours une solution. Les couturières qui ont mis en vente des masques se sont fait insulter et taxer de profiteuses, or tout travail mérite salaire même en situation de crise, le boulanger continue à vendre son pain, les supermarchés à vendre leurs produits. Des collectifs de couturières se sont mobilisés contre le travail dissimulé. La presse quotidienne relaye ainsi les interventions du collectif « Bas les masques » pour dénoncer cette situation et interpeller le gouvernement (article du 20minutes à lire ICI)

Soutenue par ce mouvement,  j’avais pris ma décision, j’allais mettre prochainement des masques barrières à la vente pour répondre à la demande.

Un coup d’arrêt lié à la législation

Cependant, la législation évolue. Après que les couturières aient répondues bénévolement à l’urgence de la situation, les normes arrivent… C’est une bonne chose, les personnes les achetant ne seront pas trompées sur ce qu’elles vont acheter, elles sauront combien de fois le masque pourra être lavé avant d’être inutilisable, elles sauront selon que le masque est de catégorie 1 ou 2 quel est le pourcentage de filtration auquel elles peuvent s’attendre, etc. Cependant comme souvent, ces nouvelles normes, législations, sont en faveur des industriels qui ont les moyens de faire tester leurs masques auprès de l’IFTH et de perdre cet argent investi si le test est non conforme, cela représente une goutte d’eau pour eux. Pour les artisans, comme nous, débourser minimum 1100€ par référence (c’est-à-dire que si on change un détail sur le masque, qu’on souhaite un second coloris, il faut refaire tester et donc payer à nouveau) sans être sûr que le masque sera homologué, c’est un investissement énorme difficilement soutenable.

Le texte mis en ligne par la direction générale des entreprises le 29 avril est assez vague et certains paragraphes semblent contradictoires. Une chose est sûre, je ne peux pas vendre de masques non sanitaires à destination des professionnels non soignants (masques de catégorie 1 et 2 dans le lien ci-dessous) car pour cela il faudrait que je fasse tester mes masques pour les mettre sur le marché à destination de ces 2 catégories. Car je n’ai pas cet argent à investir dans les tests et pas non plus l’envie.

La confection de masques lavables pourrait faire partie des articles proposés dans le cadre de ma micro entreprise dans le sens où ils sont en tissu et donc lavables, et permettent ainsi de réduire notre impact environnemental en réduisant l’utilisation des masques à usage unique. Cependant, la législation va continuer à évoluer, il est très chronophage de se tenir informée des évolutions de la loi et des normes et cela est aussi très anxiogène. Car le contenu des lois n’est pas compréhensible par tous et les interprétations nombreuses et contradictoires. De plus, ce qui était autorisé un jour J peut ne plus l’être du jour au lendemain, on peut ainsi se retrouver dans l’illégalité de vendre des masques non testés, même pour une utilisation personnelle (pour aller faire ses courses ou se promener par exemple). Les contrôles de la DGCCRF risquent d’être nombreux sur cette question de la vente des masques lavables et cela engage notre responsabilité propre.

 C’est pour toutes ces raisons que finalement, je ne mettrais pas de masque en tissu lavable à la vente.

Édit n°1 du 4 mai 2020 !

Quand je vous dis que confectionner les masques anti-postillons lavables c’est le parcours du combattant et les montagnes russes

Hier, j’étais sûre de ma décision, aujourd’hui la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances, Agnès Pannier-Runacher, affirme que les artisans peuvent continuer à confectionner et vendre les masques en respectant les spécifications Afnor (ce que j’ai fait dès le début !) sans faire les tests qui sont pour les industriels mais pas pour les artisans ! 

J’ai mal au crâne à force de me faire autant de noeux au cerveau. Aujourd’hui on nous dit officiellement vous pouvez continuer à en faire et à en vendre sans test et demain ?

Ne sais plus quoi faire, penser… Quand je vous disais dans mon post d’hier que je passe par toutes les situations émotionnelles en ce moment à ce sujet…
Et vous, quel est votre point de vue, tout en sachant qu’il ne s’agit pas d’un dispositif médical mais d’une barrière anti postillons ?

A écouter également l’interview d’Agnès Pannier-Runacher sur Europe1. 

Édit n°2 du 4 mai 2020 !

Bon voilà. On arrête ici de se prendre la tête, les artisans n’ont pas l’obligation de faire les tests mais en cas de contrôle de la DGCCRF il faudra qu’ils soient conformes à la catégorie 2 à minima au risque de lourdes amandes. Donc ma décision est définitivement prise : je ne vendrais pas de masques barrières ! Merci à Conseils Louve de décrypter tout ça pour nous !

Conseils Louve

Pour avoir un résumé des échanges entre Conseils Louve (Sindy Lallemand) et la DGCCRF du Morbihan, cliquez ICI !

Cette fois ma décision est vraiment prise, je ne mettrais pas de masque en tissu lavable à la vente.

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